Jean-Pierre Tabin analyse dans cet article la conception de dignité humaine inscrite dans la Constitution et sa compatibilité avec les pratiques de l'aide sociale.
L'article 12 de la Constitution fédérale stipule que « quiconque est dans une situation de détresse […] a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine ». Ce principe est relativement récent et lié au contexte postindustriel de protection sociale développée, de globalisation et de chômage. La conception de l'aide sociale à une période donnée est en effet en relation étroite avec les mutations des sociétés.
Nous sommes en droit de nous poser la question du respect en pratique de cette conception de dignité élaborée dans le contexte des Lumières et défini par Kant comme une valeur intrinsèque absolue, interdisant l'homme d'être traité comme une marchandise. Si l'on se penche sur la situation réelle de certains groupes spécifiques en Suisse, nous ne pouvons que constater le non-respect de cette notion. Cela est visible dans l'introduction en 1995 du minimum vital comme assistance indispensable à l'existence et non comme minimum vital social. C'est encore plus flagrant pour les demandeurs d'asile ou les personnes frappées de non entrée en matière (NEM) ne recevant pas, en Suisse, d'aide permettant la dignité humaine telle que définie plus haut.
Ainsi, cette analyse permet de rendre compte du décalage entre ce qui est énoncé dans la Constitution et des pratiques réelles à géométrie variable car différentes selon le public concerné.
Résumé : Sarah Kiani.